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Candide

Il y a des jours comme ça où on se dit qu’on aurait mieux fait de rester au lit ; ce dimanche fut un de ces foutus jours de mauvais temps où il ne pleut pas, mais où il menace de pleuvoir assez pour que l’on ne sorte pas de chez soi. La matinée fut exécrable, le réveil mollasson et pas terrible fit place à un petit déjeuner ridicule ; le repas de midi aurait été bon si les gens qui mangeaient avec lui n’avaient pas été si désagréables, tout alla mal jusqu’à l’après midi qui lui fut encore plus merdique. Tout ce qu’il avait organisé avait foiré, un gros connard lui avait pompé l’air et le moment de partir, il se dit qu’il se sentait plus chez lui chez son ami que chez ses parents ; en rentrant arriva la migraine, puis un sacré cafard au moins de la taille d’un éléphant. Vivre seul avec une pierre de douleur attachée au cou comme une ancre de bateau c’est supportable, mais c’est pas tous les jours facile. Ce soir là il s’est dit qu’il en avait marre, il se serait bien grillé une clope s’il avait fumé, mais pas moyen ; il serait bien resté bouffer chez son pote avec tous ses amis, mais il devait rentrer « chez lui ». Ainsi la vie continua, il imagina le morne lendemain et ça n’améliora pas les choses ; son seul recours fut encore une fois de s’échapper dans son imaginaire pour y trouver quelqu’un de plus malheureux que lui : pas gagné ! En fait, ce n’était pas tant ses problèmes que son absence de problèmes qui le rendaient malheureux, aussi de n’avoir personne avec qui les partager ça lui en filait un sacré coup au moral. Se dire qu’on est inutile et que personne n’a besoin de vous, c’est pas super marrant, mais ça arrive à beaucoup de monde malheureusement.

Il ne serait pas étonnant que vous trouviez toutes ces considérations totalement inintéressantes, mais moi ça me tracasse ce qui arrive à ce type là ; ainsi je me dis qu’on pourrait bien être à sa place vous et moi et qu’on rigolerait peut-être moins, mais on y est pas pour l’instant et c’est tant mieux, aussi laissez moi vous raconter une histoire un peu plus marrante et un peu plus intéressante.

Ca commence plutôt mal pour ce jeune homme que la vie avait prédestiné à rien du tout et qui s’appelait messieurs et mesdames : Sordide le bien nommé, champion toutes catégories des naïfs et des ringards, mais héros de notre histoire. Il habitait un très beau château, bloc B, appartement 212 ; situé au cœur de la province pourrie de Sarcelles, il était habité par la très grande famille adoptive de notre héros, les puissants Hernandez dont les ancêtres espagnols tenaient peut-être du Cid, on peut toujours rêver.

Toujours est-il que monsieur Hernandez, chômeur de son état, était habitué à descendre des Barons de bibine au troquet P.M.U. du coin ; madame de Hernandez était une bonne femme assez ample dont la passion était  de faire du bel esprit avec un salon d’amies et de s’adonner au commérage lorsqu’elle descendait les poubelles dans l’arrière cour. Leurs cinq enfants dont l’occupation première était la délinquance juvénile et l’emploi premier de ramender des allocs se prénommaient Juan, Paquita, Xavier, Pedro et Romano.

Juan, l’aîné était la fierté de la famille, il ne coûtait rien et ne prenait pas beaucoup de place car il était en prison ; Paquita, grâce à son contrat à durée indéterminée de prostituée arrivait à se payer sa cocaïne ; Xavier était en bonne voie pour devenir dealer et c’est dire si ses parents étaient fiers de lui ; Pedro était dans la grande entreprise Chourex® et sa société de distribution Refourgue™ et Romano qui avait trois ans rackettait déjà ses petits camarades. Au cœur de cette belle famille, Sordide était un peu une sorte d’extraterrestre ; Il n’était pas tenté par les différentes alternatives que lui offrait son milieu, il portait les cheveux longs, n’aimait pas le rap, les chaînes en or, les BMW montées sport et comble de la honte aimait la musique classique.

Ainsi, un jour que le jeune Sordide rentrait du collège par les terrains vagues où brûlaient encore quelques carcasses de voitures fraîches des émeutes de la veille ; il rencontra la jeune Paquita allongée sur un vieux matelas pourri au milieu des herbes folles, elle était passablement défoncée et assez chaude. Sordide étant dans l’âge où ces préoccupations vous tracassent, il se dit que du haut de ses quatorze ans, il se satisferait bien des vingt-deux ans de la jeune fille. S’attachant à bien faire la chose qu’il avait vu faire assez souvent un peu partout ; il avait des affinités avec la jeune fille car son état lui faisait souvent pitié, il essaye donc d’être le plus doux possible. Doux, Xavier ne le fut pas quand en le découvrant il manqua de lui fracasser le crâne à coups de chaîne de vélo, l’affaire se solda par un défonçage à grands coups de pieds dans les côtes et le visage ; ce jour là, Xavier et sa bande auraient mieux fait de laisser Sordide sur le carreau car il avait vu Orange Mécanique la veille.

Ainsi, Sordide fut laissé pour mort dans le terrain vague ; chassé du H.L.M. par les Hernandez, Sordide récupéra son perfecto et ses godasses de montagne en rentrant par le vide ordures assez large pour lui.

Crade, explosé, un tout petit peu haineux ; Sordide retrouva Xavier le vendeur de mort dans un parking souterrain où il dealait d’habitude ; Il profita de ce que celui ci était en tractations pour entrer dans sa Golf TDI pour subtiliser sa thune. Sordide était pas très costaud, mais très volontaire, une vraie teigne ; C’est ce qui faisait sa force. Armé d’une bonne brique en béton, il rencarda son presqu’enculé de frère dans une cage d’escalier, là, il lui précipita sur le crâne assez fort pour que sa cervelle gicle sur le sol ; Effet escompté, effet obtenu.

Dégoûté, Sordide profita de ce moment de réflexion pour monter un plan ingénieux de vengeance sur l’injuste société qui l’avait précipité dans une telle détresse.

Mais le lendemain, il apprit la mort par overdose de la jeune et néanmoins ex-baisable Paquita ; non que la famille lui envoya un petit mot sous le pont autoroutier où il créchait, mais il retrouva le machabé lui-même comme un grand. Imaginez l’effet sur le jeunot ; il profita de la divine inspiration que lui procurait le sourire bleuté et figé de Paquita pour foutre le feu au réservoir de butane de l’H.L.M.

Imaginez la scène pour ça ; le pèque s’en va vers son destin à travers les terrains vagues et ce sur fond d’immeubles qui brûlent, de pompiers qui se démènent sur une bonne Chevauchée des Valkyries monumentale de Wagner.

C’est ainsi, je disais donc, que Sordide perdit toute sa richesse et ce que la bonne fortune de son étoile lui avaient procuré. D’après moi, il a plutôt gagné au change, si ce n’est d’un homicide plutôt gênant et du décès d’une pauvre fille un peu paumée ; mais on choisit pas sa famille, l’endroit où on nait et encore moins celui où on meurt.

Bref, like i said : ça commence plutôt mal pour le gars Sordide.

Page vue 827 fois, créée le 06.09.2007 01h21 par guinch
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